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Leadership

Trois approches du Développement du Leadership en Coaching Individuel

Trois approches du Développement du Leadership en Coaching Individuel

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A propos : Violaine Isaac, Coach exécutif, Superviseure et Formatrice de coachs, ancienne ESCP, est la fondatrice de Be and Become, cabinet dédié à l’accompagnement des dirigeants et à la supervision.

Si le leadership était un édifice, il serait sans nul doute un ouvrage d’art plutôt qu’un bâti comme tant d’autres. Le leadership individuel est une création de chaque individu, expression de sa singularité, – style, valeurs, convictions, expérience, – qui, dans la rencontre avec un collectif, prend de l’amplitude. C’est à la fois l’intégrité de ce style et son adéquation à une culture et des besoins environnants qui lui confèrent sa puissance.

Le leadership peut se définir comme la capacité à fédérer un collectif pour atteindre un objectif, dans une relation de confiance mutuelle et dans un contexte donné. Il ne s’agit pas d’une qualité innée, apanage de quelques élus. Chaque dirigeant, chaque manager est à même de le développer. Il n’est pas à confondre avec le charisme qui, quel que soit l’admiration qu’il suscite, reste en lui-même auto-centré. Le

Leadership au contraire se développe dans un aller-retour entre les attitudes du leader et les attentes et besoins d’un groupe.

En coaching individuel plusieurs approches permettent de développer le leadership. Elles sont à choisir par le coach en fonction de plusieurs critères comme la nature de la problématique du manager, son niveau de développement personnel, sa réceptivité à l’approche et enfin son niveau d’exposition sur sa fonction.

1. L’approche cognitivo-comportementale

Protectrice, cette approche se centre sur les comportements visibles de leadership et les croyances associées. Elle vise à permettre au manager, par un travail concret, d’identifier les attitudes qu’il utilise le plus naturellement et fréquemment pour mobiliser (par exemple : énergiser, faire s’exprimer,…) et celles au contraire qu’il n’exploite pas ou peu. Un travail d’illustration de ces compétences par des situations concrètes permet d’affiner ce portrait et de révéler au manager de quelle façon, bien à lui, il met en œuvre ces comportements de leadership ; et comment, toujours avec son style, il pourrait investir les compétences non utilisées.

Cette approche, d’inspiration anglo-saxonne à l’image de celle développée par le Management Research Group, a un effet psychologique de trois ordres : il élargit la conscience que le manager a de ses atouts et développe sa confiance en lui ; il lui transmet des permissions à cultiver ses atouts ou au contraire à faire différemment ; il fait émerger ses croyances limitantes, permettant de les revisiter (par exemple : « si je fais autorité je vais brider mes N-1 et les démotiver »).

Une fois effectué ce travail de diagnostic et d’exploration, le manager va pouvoir expérimenter de nouvelles approches à partir d’une intention, en prenant en compte l’analyse des besoins de ses interlocuteurs. Reprenons l’exemple ci-dessus. Ce manager décide de développer une posture plus cadrante et plus ferme. Cela lui parait indispensable pour exercer un vrai leadership, et important pour son équipe de managers. Il perçoit en effet que ceux-ci, bien que séniors, ont besoin d’un cadrage plus orienté pour pouvoir être focusés sur les objectifs. Comme ils en manquent, ils ont des lignes de conduite hétérogènes et insuffisamment affirmées vis-à-vis de leurs clients internes. Par ailleurs le patron et le Talent Manager du manager lui ont fait part de l’importance de cet axe de progrès, pour lui-même et pour l’organisation.

A l’occasion de son prochain Codir il a décidé de profiter du lancement du processus budgétaire pour poser plus fermement les orientations 2019. Il a réfléchi à l’aide de son coach à la manière dont il va s’y prendre pour exercer cette posture avec son style : il va s’exprimer à partir de ses convictions, de manière plus personnelle et va rappeler les enjeux, les objectifs et les priorités, en utilisant son talent pour structurer les idées.

L’analyse de l’impact qu’il va obtenir (à partir de ses perceptions et de feed-backs) permettra d’ajuster sa posture les fois suivantes, ou de répéter au contraire les attitudes bénéfiques. Au fil des expérimentions le manager mettra en oeuvre de plus en plus facilement les postures choisies, en s’ajustant aux réactions de son collectif, et à ses propres besoins. Les bénéfices positifs lui donneront envie de reproduire, et contribueront à faire évoluer ses croyances (« si je suis plus cadrant sur la direction, je sécurise mes N-1, et au contraire ils sont plus motivés et déterminés»).

2. L’approche émotionnelle de développement du leadership

Dans le cadre du coaching d’entreprise, elle doit être utilisée avec précaution, est pertinente pour les managers qui privilégient le champ cognitif et sont insuffisamment en contact avec leurs ressentis et ceux de leur collectif. Une lecture uniquement intellectuelle du fonctionnement d’un groupe, en effet, ne peut permettre de tisser véritablement de lien avec lui et d’être attentif à ses besoins.

Cette approche consiste à rendre le leader attentif d’une part aux signaux forts et faibles qu’émet son collectif, c’est-à-dire à développer sa « conscience sociale », au sens de Daniel Goleman ; et d’autre part à le rendre attentif à ses propres ressentis (« conscience de soi » en référence au même auteur). Il s’agit donc de lui permettre de développer ces polarités de l’intelligence émotionnelle, clé de voute du leadership.

Ce travail peut être réalisé par exemple à partir de l’analyse de situations : que s’est-il passé durant telle réunion pour le groupe et pour chacun des membres, qu’a-t-il observé ? perçu comme ressenti chez ses N-1 ? comment s’est-il senti lui-même pendant cette réunion ? Petit à petit le manager va prendre en compte le paramètre émotionnel qui est un indicateur clé de ce qui se passe dans les interactions.

Dans le cas de notre manager précité, on pourra par exemple lui permettre de sentir que lorsque dans l’animation de son Codir il reste flou sur l’ordre du jour, ne cadre pas les débats et laisse dériver la réunion, certains de ses N-1 deviennent trop systématiquement rebelles voire irrespectueux vis-à-vis de leurs pairs et de son rôle à lui. Il se rendra également compte qu’à ce moment-là il se ne se sent pas respecté dans son rôle, se sent illégitime et a peur d’être dépassé par la situation. Le comportement du groupe, et son sentiment à lui, une fois identifiés, vont devenir des indicateurs pour lui qu’il n’est pas assez cadrant. On va donc l’inviter à attacher de l’importance à ses perceptions ; et à réfléchir au besoin de ses N-1 (sécurité, structure) et à son besoin à lui (maitrise), qu’il va satisfaire par plus de cadrage.

On pourra également lui faire réaliser plus directement un travail sur l’empathie en le faisant se mettre à la place de ses N-1.

L’approche émotionnelle consiste également à faire expérimenter au manager dans l’ici et maintenant de la séance de coaching, une écoute véritable et la possibilité d’identifier ses sentiments et émotions dans l’instant présent. C’est la relation manager-coach qui devient alors le laboratoire dans lequel le manager expérimente, et développe sa conscience émotionnelle. Une fois plus en contact avec ses ressentis, il pourra plus facilement sentir l’état d’esprit, on pourrait dire l’« état d’âme » de ses N-1.

Le coach devra alors veiller à ce que le manager ne se rende pas vulnérable en mettant en application sur le terrain des démarches trop authentiques ou trop ouvertes dans un environnement qui ne serait pas prêt (culture, niveau de maturité du collectif). Le dosage reste donc indispensable.

3. L’approche profonde

Cette 3e approche est l’approche identitaire du leadership : elle se centre sur la personne qu’est le leader. Elle propose de mettre le style du leader, ses valeurs, ses convictions, en lien avec son parcours de vie, personnel et professionnel. Elle permet de faire émerger le sens profond de son engagement en tant que leader, ce qui a un effet de clarté pour lui, de cohérence, donc d’affirmation, que les équipes vont immédiatement ressentir.

Par exemple le manager va prendre conscience que s’il a voulu être très tôt en première ligne dans sa carrière et être un leader, c’est à l’origine parce qu’il a été l’ainé d’une famille d’agriculteurs, qui valorisaient la prise de responsabilités et le fait de veiller sur les plus jeunes. Cette mise en perspective personnelle va avoir un effet de sens qui va rendre beaucoup plus lumineux le pourquoi de son engagement sur cette fonction.

Grâce à l’approche identitaire, le manager pourra également relier sa difficulté à faire autorité au style d’éducation qu’il a reçue. S’il pense avoir reçu une autorité parentale très directive, qu’il a mal acceptée, il pourra s’imaginer que lorsqu’il cadre ses N-1 il les bride.

Il va se rendre compte que son contexte professionnel n’a rien à voir avec le passé et qu’il peut trouver aujourd’hui sa manière d’être un manager parfois directif, sans pour autant brider l’initiative. Il va sortir en quelques sortes de cette confusion avec ce schéma ancien.

L’approche identitaire pourra lui permettre enfin de mener une réflexion sur ses valeurs : les siennes propres, et celles qu’il a héritées de sa culture familiale. Une fois au clair avec les principes moraux importants pour lui, il va pouvoir les mettre en regard des valeurs de son entreprise, et faire des choix (accepter des compromis, assumer certaines de ses valeurs, etc…). Il va également pouvoir, à travers son action managériale au quotidien, véhiculer un modèle managérial qu’il aura nommé et dont il pourra ainsi se servir comme d’un outil au service du développement de son collectif et de la performance. Par exemple s’il a reçu une valeur de solidarité, qui lui tient à coeur, il pourra sciamment la partager au sein de son collectif, de manière incarnée, faire réagir ses N-1 et susciter l’adhésion. Plutôt que de l’imposer ou de ne pas tolérer des comportements individualistes.

L’approche identitaire procède par liens entre le présent professionnel et passé personnel, sans jamais creuser l’histoire. Il s’agit de laisser s’exprimer la personne et de l’aider à relier les contextes passés et présents, c’est-à-dire à faire des analogies. Son principal intérêt en coaching est de procurer des effets importants et à long terme. Elle nécessite toutefois deux conditions pour être utilisée : l’intérêt et l’envie du manager de parler de sa trajectoire, et un niveau de développement personnel suffisant du coach, qui doit pouvoir être un facilitateur éclairé de cette réflexion.

Les prises de conscience permises par l’approche identitaire vont permettre au manager d’agir avec plus de distance, de façon plus choisie, et plus sous le coup d’«une histoire agie».

Pour le manager l’apport ressenti de cette approche est un sentiment d’alignement personnel, de l’affirmation, et une cohérence de son action, piliers essentiels du leadership.

Ces 3 approches de développement du leadership, cognitivo-comportementale, émotionnelle et identitaire, sont à choisir et à doser pour chaque personne accompagnée. Il existe bien entendu d’autres approches très pertinentes. Elles peuvent se combiner dans le cadre d’une approche intégrative, qui seule peut répondre pleinement au besoin du manager, tout en étant écologique pour lui et pour l’organisation environnante.